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ART ET ACTIONS AU FIL DE L'EAU DE COMMERCY À ROTTERDAM - JUILLET AOÛT 2006




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D A N Y   K O W A L S K I



“L’espace, toujours. Cela a été assez long de trouver quelque chose dans lequel je me sente bien”.




Dans les méandres du fil conducteur qui mène Dany Kowalski aux installations, installations-performances,
performances, on découvre dans chacun de ses travaux des expériences uniques avec des ingrédients
communs :
les mots, les tissus, les roses, et les rencontres.



Les mots du poète Annie Colin, Dany Kowalski les matérialise en toile douce, toile dure,
dentelles, papiers de soie ... pour chaque poème les matières s’imposent en fonction
de leur transparence, leur mouvance, leur symbolique et leur même leur histoire.
Sur le lieu de la performance la comédienne Muriel Carrupt et Dany Kowalski manipulent
les poèmes chiffons lancent la poésie, les mots planent. La voix de la chanteuse
Annick Nozati s’insinue, résonne dans l’espace. Une à une les œuvres répondent
au toucher et aux gestes. Les images vidéo transparaissent.
Derrière la caméra, Kamel Maad plonge au cœur de l’oeuvre vivante à la rencontre
de la matière et des personnes.


“Les œuvres prennent vie et se révèlent alors aux spectateurs. L’alchimie est étonnante.
Elle séduit tous ceux qui aiment se laisser surprendre et entraîner dans l’espace d’intimité
de l’union des arts”  (1)



Avec les mots de paroles sous terre, il est ici question de soldats allemands
pendant le premier conflit mondial.


 “...souvent très jeunes, morts à cette guerre, ils ont laissé des lettres, destinées à leurs proches,
et leurs paroles oubliées, criantes d’humanité peuvent être déterrées et retrouver une nouvelle vie,
une nouvelle lecture... Le dispositif des grandes feuilles prendra place à même le sol allusivement,
et, sur vingt “socles de plomb”, reposent vingt feuilles de papier. L’ensemble sera à peine éclairé
par neuf lampes de faible intensité.
La mort ne lave rien aucun péché du monde.
"Elle est mauvaise comme le reste” confiera Alfred Vaert. Dany Kowalski finit sur cette idée.
L’art de Dany Kowalski n’est pas bavard mais il est plein de ces lettres qui
en font le terreau”. (2)


Le terreau, c’est aussi la terre de son père, originaire du sud de Varsovie, Dany Kowalski
tisse les racines d’orties comme
Ignace, son grand-père, tressait des paniers.
<< Il m’a fallu longtemps pour aller en Pologne. Pour savoir. Pour connaître ce qui était caché. >>


Lorsqu’en 2001, Dany Kowalski participe à la biennale de Poznan en Pologne,
elle brode avec ses cheveux sur le tissu de l’installation
outrage à l’impudeur
une phrase en polonais “ Plus tu regardes et plus tu comprends le pourquoi des roses”.


Des roses en tissu vert fluorescent, elle va en créer des énormes qui seront hissées
dans le ciel de pierres des églises pour honorer les “Indes
galantes” de Jean Philippe Rameau.


” Deux clavecinistes ici ...

leur frère-écho ailleurs.
Déroulezla toile de son
la plasticienne Dany Kowalski
y dévoilera ses sortilèges.
Certain soir, il se peux que
des lutins curieux escaladent
un sauvage ou un turc.
Et si une muse Frédérique Debitte (acrobate aérienne)
s’amuse, si elle muse
dusoleil à la lune,
plonge dans l’armoire
ou s’ébat dans le taffetas.
qui le lui reprochera?
La couleur du son ?
Anne Catherine Bucher et Benoit Hartoin (clavecinistes)
Non.
Car les clavecins David Boinnard (facteur)
lui confieront qu’en ce pays,
tout peut être songe,
rien ne doit être dit.” (3)




Pas dit non plus le mot sang dans Sans secret.
Le grand drap blanc se rappelle du graphisme inquiétant que Dany Kowalski dessinait sur son corps.




Il y a aussi les mots lancés par Ly Thanh Tiên (danseur-poète), et ceux de Kamel Maad
en vidéo que Dany Kowalski rattrape au vol lors des
performances dans l’installation
sonore de Laurent Charles pour les
KaléÏdophonies I-II-III.
"La hauteur de ses gestes-sons résonne à travers ses mots-sons coulissant le long de la toile-écran,
ou l’image-trait se recouvre de sons-voix.”(4)


KaléÏdophonie X-XI-XII
, c’est d’abord la découverte de l’Estérel : par le détail,
des centaines d’images restituent les impressions d’un été.
L’eau, l’air et la terre se répondent
en boucle infinie, joyeuse et colorée
sur les 3 écrans. Puis le feu va envahir la toile et affronter
les assauts
de la peinture. Après le feu, un silence étourdissant, seul le vent tient notre écoute
en éveil. Tout le travail se déroule autour de la superposition de la poésie dite, vécue
et l’émergence d’une matière sonore abstraite qui se met lentement en mouvement.



“Autant d’expériences durant lesquelles l’artiste se met en scène, expose les traces graphiques
de son inquiétude et de son énergie, les incarne sur des matières fibreuses.” (5)




(1) Catherine Belin
(2)
Laurence Boitel
(3) Annie Colin
(4)  Laurent Charles
(5) Françoise Monin





• • • • • • • P A T R I C K   H E R V E L I N
CV


Le pèlerin


Arpenteur des terres sensibles qui l'emmènent vers sa nature, l'artiste voyageur
peu à peu se dépouille des scories de l'âme. La sincérité d'une communion écologiste
survient, le voici démiurge joyeux d'une masse qu'il met au monde.

Hervelin a décidé depuis bien longtemps que la matière serait son terrain de jeu,
son théâtre, son jardin botanique. Il s'y retrouve en compagnie d'entités bavardes,
qui disent la danse des végétaux dans le vent, le malheur des vaches rendues folles,
la nécessité d'un bâton de pèlerin pour avancer vers sa propre nature.
De bronze, de fer, de fonte ou de toute autre matière qui lui répondra,
cette sculpture-là témoigne de la fragilité et de la puissance d'une Terre
que l'on oublie d'aimer. Un monde pourtant plein de malices, que l'artiste extrait
d'une valise de son univers intime. L'eau, l'air, le feu participent à cette mise
en lumières: par ce que les éléments recèlent, par les principes actifs
qu'ils génèrent, par leurs rapports aux paradigmes de l'énergie.

Le chaos s'en trouve laminé, tout devient plus limpide. La nature fait ce qu'elle a
à faire: les reliefs de l'eau, le costume de la pintade, les couleurs des arbres
dans le vent, l'éclat du bronze, le parfum du terreau. La vie !

L'Homme peut alors s'expliquer avec une faune et une humanité bienveillantes,
jaillissant en formes rondes ou aiguës, mais toujours portées par un mouvement
naturel. Sans jamais contrarier cette propension à la liberté, Hervelin bâtit
une planète spectrale et drolatique, qui touche à nos émotions, à notre réflexion,
à notre spiritualité.

Catherine Belin